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Nicolas Moineau réalise son grand projet à St-Géry – Nicolas Moineau completes his super project in St-Géry

  • 17/03/2020

Juste avant une sombre période de confinement qui se profile liée à la pandémie de Covid-19 (et que, en tant que média outdoor, nous vous invitons à respecter par citoyenneté), Nicolas Moineau (champion du Monde déficient visuel 2012) a concrétisé ce dimanche son super projet, avec la réussite de “Aller-retour pour une mèche”, 7c+ sur la falaise de St-Géry en vallée du Lot. On revient avec Nico là-dessus, histoire de se rendre compte, si le doute était encore permis, qu’il n’est pas devenu un champion par inadvertance et que rien n’est laissé au hasard…

– Comment cette voie est devenue ton projet ?
En 2018, j’ai commencé à réfléchir à un projet ambitieux, en tout cas je voulais franchir un cap. Quand j’arrivais au bout d’un projet en 7b/7b+ j’avais toujours l’impression d’avoir encore du jus arrivé au relais et une impression de «peut mieux faire ». Dans mon cas, mes premières impressions sur une ligne, c’est ce que m’en disent les autres, je ne peux pas me faire ma propre idée avant d’avoir touché les prises. Le fait que 2 potes me conseillent d’aller essayer cette ligne m’a décidé. Et ça ne pouvait pas être ailleurs qu’à St Géry (la maison) pour des raisons pratiques. Je ne conduis pas, le spot est accessible en car, près de chez moi, bref l’aspect pratique était important.

– Depuis combien de temps étais-tu dessus ?
J’ai touché les premières prises fin 2018, j’ai réussi à poser les 2 premiers points et puis plus rien, après c’était le désert. Je savais que je partais dans un projet de trimard, le secteur est moins en conditions l’hiver, du coup j’ai lâché l’affaire quelques mois, le temps de finir mes projets en cours, et je m’y suis remis en mars 2019. Parler de nombre d’essais et de séances me paraît impossible tant le travail de découverte et le calage avançaient lentement. Plus j’avançais et plus je prenais conscience de l’ampleur du projet. J’ai fini par employer les grands moyens : pour travailler les sections, j’ai installé une corde fixe et fait pas mal de montées de travail avec un bloqueur. Il y avait un groupe de bordelais qui étaient là tous les weekends et parmi eux Marion qui s’était mis dans ce projet ; du coup, elle et son copain m’ont pas mal aidé à monter la corde fixe, poser les dégaines etc… Bonne ambiance, émulation, entraide. Tout ça pour commencer à taper les 1ers essais vers l’automne, avec une paire de genouillères pour bien optimiser les repos. Deux très beaux essais en novembre et puis gros déboire météo, 5 semaines de pluie, résurgence dans la voie, du coup j’ai dû laisser ça de côté pendant 2 mois. J’ai utilisé des artifices inédits pour ce projet (genouillères, cordes fixe) mais je ne pouvais pas franchir le pas du PQ sur les colos pour pomper la flotte (des principes à la con d’écolo, mais voilà j’ai laissé pisser). Retour dans la voie en janvier dernier avec l’impression de tout reprendre à zéro, et donc gros coup dans la motivation. Et puis les sensations sont revenues assez vite. 2 ou 3 essais en février à 2 doigts de La Croix, et puis de nouveau 15 jours de pluie, résurgence etc… J’ai recommencé à taper des essais la semaine dernière avec parfois une telle pression que j’avais l’impression de mal grimper, de chercher les prises… Et puis voilà, hier, le run parfait. Donc un travail long et fastidieux de découverte et de calage des méthodes, mais des vrais essais, une dizaine je pense.

Photo : Stéphanie Para

– Comment s’est passé le travail de la voie ?
Pour garder la motivation je me suis fixé des petits objectifs. Il y a un genou à caler à la moitié de la voie, à la fin d’une section de 25 mouvements sur petites prises en léger dévers, avec 2 pas dynamiques ce qui ne sont pas évidents pour moi. Je ne savais pas vraiment dans quoi je m’engageais et même si j’en étais capable. Je m’étais fixé comme objectif d’enchaîner jusqu’au repos avant l’été et j’ai pris pas mal de retard. Cette première section est la plus dure et l’été torride n’a pas été propice à rattraper ce retard. Je me suis fait des séances de travail de 19h à 22h par 32°, tout ça pour caler des séquences de quelques mouv, et ma compagne me suivait dans cette galère ; là on était plus trop dans le plaisir de grimper. Je crois que j’ai réussi à enchaîner cette première partie à la fin de l’été. La suite, plus déversante et plus sculptée, allait me poser plus de problèmes : même si elle est peut être intrinsèquement moins difficile, elle est plus sculptée, avec des colos et des concrétions, repérer et mémoriser les prises dans cet environnement en 3D m’a posé pas mal de problèmes. Cette section déversante se finit sur un bi-doigt qui me découpait les doigts et, avec du Strap ça ne rentrait plus. Ca m’a demandé un peu temps pour trouver la bonne préhension. Quand j’ai commencé à taper mes 1ers essais, j’ai décidé de grimper avec le casque, ce qui n’est pas dans mes habitudes. Je ne sentais pas si la corde passait derrière ma jambe, trop concentré sur les mouv’, et puis les genouillères atténuent les sensations de la corde le long des jambes. A ce moment-là ma motivation est revenue au max, il y avait encore 2 mouv à caler et après ça se calmait. J’ai quand même trouvé le moyen de tomber dans les 4 derniers mètres sur un essai dément (la peur de réussir sûrement..).

Photo : Stéphanie Para

Quels enseignements en retires-tu ?
J’ai pas mal travaillé la voie sur corde fixe, du coup maintenant je suis à peu près au point avec un bloqueur en progression sur corde. Mis à part ce détail technique, garder la motivation et le plaisir pendant un an a été le plus compliqué. Pour ça je me fixais des objectifs raisonnables section après section. J’étais prêt psychologiquement dès le début à trimer longtemps pour y arriver. Et après quelques mois de travail, l’échec n’était pas envisageable, l’investissement avait été trop important. Après, pour les qualités physiques requises, dans mon cas, ce n’est pas une nouveauté que c’est la précision, le relâchement et la qualité de grimpe qui font la différence. Je n’ai pas fait d’entraînement spécifique sur pan etc… Je ne grimpe quasiment plus sur du plastique. Je ne suis pas sûr d’avoir gagné en force, résistance etc, par contre j’ai appris à grimper relâché même sur petites prises. Dans l’immédiat je pense reprendre des projets plus raisonnables qui peuvent sortir en peu d’essais, retrouver le plaisir de la découverte et du « à vue ». Je me suis tellement impliqué dans cette voie que j’ai presque l’impression d’avoir régressé en grimpe à vue. C’est possible que je reparte pour un gros chantier mais pas cette année, peut-être un8a en 2021 pourquoi pas, j’ai déjà une voie en tête.

Photo: Stéphanie Para

Just before a dark period of confinament due to the Covid-19 pandemic (and like outdoor media we invit everybody to respect), Nicolas Moineau (2012 visuel impairment World champion) just crushed his long time project with “Aller-retour pour une mèche” 7c+ located at St-Géry (South West of France). We had no doubts, but with his answers below, we easily understood that he wasn’t become a Champion by chance, all is planned…

– How this route became your project?
In 2018, I was thinking about ambitious projects because I wanted to break a barrier. When I clipped the anchor of 7b/b+ projects, in my mind, I was thinking I could climb harder things. 2 friends adviced to me this line, and I choose this crag for practical reasons. I can’t drive and the crag is deserved by bus from my home.

– How long was the process?
I touched the first hold at the end of 2018. Juste the 2 first bolts then I stppped because it was Winter. I restarted at SPring 2019 and worked it a lot with on static rope. I was making good tries during the Fall then the weather turned bad for weeks. I restarted to climb in the route in January, finally found quite fast my feelings and betas and was closer and closer since the send on Sunday.


– What about the tries?
For keeping my motivation high, I fixed to me little goals. For example: climb the beginning (25 moves) into a kneebar rest. I struggled a lot inside this part last Summer with late evening sessions during heat but I finally completed this section at the end of the Summer. The last part with more tufas caused me some memory troubles and a sharp twofinger pocket hurt me a little bit the skin at the end and was hard to hold with tape.

What did you learn from this send?
I worked a lot the route on fixed rope, so now I’m used with this tip. After that I will say the main difficulty was to maintain high motivation during more than a year, and it was complicated. For that, fixed lower goals step by step was important. This Spring I was ready to fight and it was not possible to give up. I think now I will climb in easier routes for testing the pleasure of discovering new things and to climb onsight. But may ba why not a redpoint 8a project in 2021, I have some ideas…

Photo : Stéphanie Para

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