À l’aube de 2025, Seb Berthe (secondé par Soline Kentzel) a réussi l’exploit d’enchainer le « mur de l’aube », aka le « Dawn Wall ». Pour mémoire, il s’agit du big wall le plus dur au monde (9a max) concocté en quelque 8 années par Tommy Caldwell, et gravi pour la première fois par ses soins et ceux de Kevin Jorgeson en 2015. Si le « Dawn Wall » a également marqué les esprits à l’époque, c’est parce qu’il s’agissait de la première voie en libre sur la face sud-est de El Cap, la bien-nommée « Wall of Early Morning Light » (mur de la lumière du petit matin).
Seb signe ici la quatrième ascension de la voie. On se souvient du passage éclair de Adam Ondra en 2016, couronné par un pliage en 8 jours de push seulement. Il en avait fallu 19 à Tommy Caldwell, et 14 à Seb Berthe, donc 5 de repos, sans retour au sol ni ravitaillement. Voici donc une belle et ambitieuse entreprise entamée il y a deux ans terminée pour le Belge ! Le récit de son push ci-dessous.
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Jour 1 : Longueur 1 à 6, et deux essais dans la longueur 7 (chute au dernier mouv). Départ à 5h. Je suis assez stressé, mais aussi plutôt motivé et excité ! Grimpe le matin jusqu’à la longueur 5 (j’enchaine la longue et exigeante longueur 3, une 5.13c/8a+ bien costaud, au deuxième essai à cause d’une zipette infortunée juste sous le relais lors de mon premier essai). Pause de 2-3h sur la terrasse au pied de la longueur 6.
J’enchaine la longueur 6 directement quand l’ombre arrive. Recalage et tick de la 7, un 5.14a/8b+ glissant, technique et aléatoire. Ensuite je mets un essai juste avant l’arrivée de la nuit : je passe le crux et toute la section dure, sauf que j’oublie de clipper plusieurs protections ainsi que la plaquette en fin de difficulté. Je suis maintenant bien au-dessus de ma dernière protection, un mauvais birdbeak un peu rouillé, et je me sens bien entamé. Là, il ne vaut mieux pas tomber (je risquerais de faire une chute de près d’une vingtaine de mètres et d’arracher les protections placées) et je me sens complètement à la limite. La chute risque d’être impardonnable (surtout avec ma blessure au dos qui commence à me refaire souffrir) et je décide donc, à contrecœur, d’abandonner de me jeter pleine main sur la dégaine. Ouf je suis sain et sauf malgré le gros coup d’adrénaline. Une belle manière intense de terminer cette première journée. Il fait noir, et je réessayerai demain.
Jour 2 : Longueurs 7 – 8 – 9. J’attends l’ombre pour grimper, il est 14h30 lorsque je mets mon essai dans la 7. Je passe le crux assez facilement mais mes doigts et mes orteils fatiguent dans la suite, et je dois me battre vraiment pour arriver jusqu’au relais ! Yes, le premier 5.14 est enchaîné 🙂 Plus que 6 ahah ! Je m’élance dans la suivante, un 5.13d/8b court et bloc sur plaquette, un beau challenge technique et à doigt. 1er essais je zippe, 2e essai je jarte de la main, 3e essais mon talon glisse, 4e essais je me trompe de méthode,… Ouille ça commence à faire long et à être dur.
Heureusement, je finis par trouver la méthode qui me convient le mieux et j’enchaîne la longueur à l’essai suivant (le 5 ou 6e essai). Il fait noir à présent, mais il faut que je continue à grimper car l’objectif était d’aller jusqu’à la 9. Je mets la frontale et je m’élance dans cette traversée un peu physique cotée 5.13c/8a+. Rapidement et sans encombre j’arrive au relais.
Jour 3 : Repos au camp portaledge. Après deux jours plutôt intenses, je décide de prendre un jour de repos car les longueurs qui suivent sont particulièrement dures et exigeantes. L’enjeu est de soigner ma peau au mieux, m’alimenter et m’hydrater à fond, rester à l’ombre le plus possible (je me protège du soleil avec mon sac de couchage que j’accroche au-dessus de mon portaledge).
Jour 4 : Longueurs 10 – 11 – 12 – 13. Le jour 4 est une journée particulièrement importante pour la suite de l’ascension, j’ai l’impression qu’il me faut absolument enchaîner ces longueurs rapidement et sans trop y laisser des cartouches. Après un recalage au soleil des protections dans la longueurs 10 (5.14a/b – 8b+/8c), j’enchaine à mon premier essai avec un bon combat dans le crux. Je fais la longueur 11 (directement après à la tombée de la nuit). Je prends 30min de repos et de nouveau j’enchaine la longueur 12 (5.14b – 8c) à mon premier essai. La longueur 13 (5.13b – 8a) passe également au premier essai après un petit recalage. La séance s’est déroulée au mieux, me voilà au pied de LA longueur 14 ! Je suis tellement motivé et sous adrénaline que j’hésite à continuer cette soirée là et à essayer directement la fameuse longueur crux.
Jour 5 : Repos en prévision de mes essais du lendemain dans la longueur crux. Je ne me sens pas particulièrement fatigué mais c’est important d’être le plus frais possible.
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Jour 6 : Les conditions sont plutôt chaudes aujourd’hui pour un mois de janvier et je sais que la chaleur est un facteur particulièrement déterminant pour le succès de cette longueur 14 (5.14d – 9a) au triple crux. Je décide donc de commencer à grimper à 5h du matin avant le lever du jour et surtout avant que le soleil frappe le mur. J’ai jusqu‘à 8h. A 5h30 je mets un premier essai de travail pour recaler les sensations et remettre les traits de magnésie, particulièrement importants dans cette longueurs (sans eux c’est presque comme si les prises n’existaient pas…). J’ai des bonnes sensations. Je m’élance dans un premier essai : je vole à travers la longueur, tout me semble facile, en quelque petite minutes je me retrouve déjà au dernier crux, ça y est je peux le faire ! Je fais le grand mouv vers la gauche, puis au moment où je m’apprête à aller chercher les deux dernières prises, je zippe…. AH ! un cri de tristesse me déchire le cœur. J’ai beaucoup d’émotions et de déception en tombant. C’est dur !
Je prends 20 minutes pour me reconcentrer et remettre un essai avant que le soleil arrive. Mon deuxième essai pareil, je me sens super bien et j’arrive frais dans le dernier crux. Puis, pareil : je zippe sans prévenir dans un grand cri de déception. Le soleil est là c’est fini pour aujourd’hui… Ah je me sens tellement proche… Et pourtant j’ai l’impression qu’il y a quelque chose qui ne va pas et que je pourrais continuer de zipper encore et encore dans ce mouvement.
De retour au portaledge, je fais face à un autre problème. Je ne sais pas pourquoi, mais mon dos me fait énormément souffrir. Je suis complètement bloqué et au moindre mouvement j’ai mal.
Jour 7 et 8 : Repos. Alors que je pensais regrimper directement le lendemain de ma séance, je sais, dès que je me lève, que ce ne sera pas possible. Mon dos me fait trop souffrir. Impossible de grimper aujourd’hui et pareil le lendemain. Je commence à douter que je vais pouvoir terminer ce push. Puis petit à petit, à force d’étirements légers, ça commence à aller mieux sans pour autant partir complètement.
Jour 9 : Longueur 14. Quand je me lève, je sens que mon dos va mieux et que sans pour autant être guéri, je vais pouvoir grimper avec un ibuprofène. La journée est nuageuse et froide, les conditions parfaites. Échauffement en recalant ce dernier crux pour comprendre ce qui ne va pas et pourquoi j’ai zippé deux fois la séance précédente. Je pense trouver une solution, il s’agit d’un détail, une affaire de position de pied. Je sais que les détails font la différence dans cette voie. C’est parti pour les essais. Malheureusement tout ne se passe pas comme j’espérais : essai 1, je perds l’équilibre dans le crux 2. Essais 2, 3 et 4, je zippe dans le crux 1. Mon dos me fait souffrir. J’ai du mal à garder mes orteils au chaud dans mes chaussons serrés, le sang ne circule plus. Heureusement, Soline qui sans doute gagnerait le titre de meilleure assureuse de tous les temps s’occupe de les réchauffer contre elle entre mes essais. Essai 5, je repasse le crux 1 mais tombe de nouveau dans le crux 2… Moralement ça devient dur. Essai 6, 7, 8 et 9, je zippe encore dans le crux 1. C’est compliqué, je désespère et peine à y croire encore. Je revois mon échec d’il y a deux ans et commence à douter de mes capacités à enchaîner cette longueur. Le temps a filé, il est 16h30 et la météo est menaçante. A 17h ils annonçaient une belle tempête de neige. Bon j’ai un dernier essai ! Je me convainc de pouvoir le faire, il faut que je donne tout. Essai 10. Ma grimpe n’est pas forcément fluide ni facile comme à la séance précédente, mais je reste sur le mur dans le crux 1, puis dans le crux 2. Allez c’est possible. Mais à mon grand malheur alors que j’arrive au dernier repos avant le crux 3, il se met à neiger, et pas qu’un peu. Mes chaussons et mes doigts commencent à mouiller. J’ai l’impression que c’est foutu, c’est déjà dur de pas zipper, alors quand il neige… mais je vais quand même essayer, tant qu’à être là. J’ai très peu de temps avant que tout soit trempé. Je m’élance dans le crux 3 avec envie, je n’ai rien à perdre. Sans vraiment comprendre comment, je fais le grand mouv, puis le suivant et encore le suivant. Mon pied reste en place. Je m’apprête à aller chercher le bac final, je suis encore sur le mur… Ca y est ! J’ai enchainé la 14 ! Sous la neige ! La sensation est puissante, une joie intense me submerge. Quelle journée remplie d’émotion. Retour dans le portaledge avec euphorie sous une fameuse tempête de neige.
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Jour 10 : Longueur 15. Malgré la longue journée d’hier je m’apprête à grimper, je suis bien-sûr hyper motivé. A cause de l’excitation, j’ai pas dormi de la nuit. J’ai encore bien mal au dos, mais la séance d’hier n’a pas empiré le problème. La journée est nuageuse, les conditions sont au top.
La longueur 15 est le deuxième gros challenge du Dawnwall après la 14. C’est là que Kevin Jorgeson est resté bloqué pendant la first ascent en 2015. La longueur est cotée 5.14c/d – 8c+/9a. Pour ma part je dirais sans doute plutôt 8c+, mais un 8c+ sacrément technique et à doigts. Une longue approche autour de 5.13d – 8b, puis un long pas de bloc de précision sur les pieds et les doigts. Une première montée de calage pour mettre les traits de magnésie, puis c’est parti. Je me sens très fort dans mon premier essai, j’arrive vite au crux final. Je sens que ça peut le faire, puis “shit” je zippe, sans prévenir. Retour au relais précédent, 20 minutes de repos. 2e essai, je fais une erreur et zippe dans le début. Mince, dans ma tête je
commence à douter, à me dire que je vais continuer de zipper encore et encore comme dans la 14. Mais j’arrive à me reprendre, me focaliser sur ce que j’ai à faire et pas sur le résultat. Mon essai suivant est le bon ! Je force un peu plus qu’il n’en faut dans les doigts dans le crux, je reste focus dans la gestion finale, et ça passe ! Yes!!! La ça commence à sentir bon, je suis heureux !
Il reste du temps de journée et je crois avoir encore de l’énergie. Alors je me jette sur la longueur 16, la loop pitch (alternative du fameux dyno, un 5.14a – 8b+). Probablement la longueur la plus particulière du Dawnwall : constituée d’une désescalade du vingtaine de mètres jusqu’à une petite terrasse , une traversée facile vers la gauche et une remontée rési et exigeante. J’ai moins bien calé ces longueurs-là comparées aux premières, dès le début je savais que je n’étais pas complètement prêt pour ces longueurs.
Je passe 45 minutes à recaler la longueur. Puis je mets un essai, tombe dans le bloc de désescalade que j’ai beaucoup de mal à maîtriser. C’est très bizarre de forcer comme ça en désescalade. Manque de stratégie : j’essaye à de multiples reprises sans y arriver, jusqu’à ce que deux de mes doigts finissent en sang. Ça y est, ma peau part en lambeaux.
Jour 11 : Repos. Je ne pensais pas forcément me reposer, mais je dois me rendre à l’évidence : les deux jours précédents m’ont épuisé et ma peau est dans un mauvais état. Le plus malin est de se reposer, même si j’ai envie de foncer vers le sommet. Mon dos par contre se stabilise, les deux journées de grimpe ne l’ont pas empiré.
Jour 12 : Longueur 16. Journée particulièrement difficile en perspective. La mauvaise nouvelle en se levant, c’est la météo : il reste 3 jours de beau temps avant une belle tempête de pluie de presque une semaine. Il faut absolument que je termine la voie avant que ce mauvais temps arrive, sinon toute la fin et les dernières longueurs risquent d’être mouillées et potentiellement impraticables. Je suis particulièrement stressé et ce n’est pas la fin de push plus tranquille que j’espérais, d’autant plus je suis incertain sur mes capacités à enchaîner ces dernières longueurs dures rapidement, car pas assez calé.
Je démarre tôt ce matin là. Mon objectif est d’enchaîner au moins la 16 et la 17 (particulièrement important si je veux finir en 3 jours avant la pluie). J’ai des bonnes sensations, mais au fil des essais, je continue à tomber dans la désescalade. A chaque fois, une petite erreur me fait perdre l’équilibre. Le soleil arrive sur la paroi et je n’ai toujours pas passé la descente. Je décide de mettre un dernier essai avant d’attendre l’ombre. Ouf, non sans difficulté ça passe. Je me retrouve sur la vire en bas, un repos plus que complet, tu peux t’y asseoir et même enlever les chaussons. Je décide de ne pas trop m’y attarder car le soleil tape maintenant et je dois la terminer avant qu’il fasse trop chaud. Je grimpe pas mal, passe le crux mais tombe en zippant en fin de longueur.
Malheureusement, je dois m’y résoudre, si je veux enchainer le Dawnwall avant la pluie : il faut que j’avance et je décide donc de faire une entorse à mon éthique et à la place de refaire toute la descente je décide de repartir depuis la vire en bas de la longueur, et de donc de couper la loop pitch en deux longueurs (ce qui donne probablement deux 5.13d à la place d’un 5.14a). Je prends 10 minutes de repos et je repars. Quelques minutes plus tard, je me retrouve au relais en ayant enchaîné la montée ! La loop Pitch est dans la poche !
Je ne me sens pas forcément bien avec cette décision et cette faute de style, mais d’un autre côté, elle ne manque pas complètement de logique : la terrasse en bas de la la loop pitch est sans doute la meilleure vire qu’il y a dans la voie depuis plus de 10 longueurs. Je prends quelques heures de repos avant de me lancer dans la longueur 17, le dernier 5.14a de la voie. Cet après-midi là, je ne me sens pas très bien, j’ai la nausée et mal à la tête. J’ai l’impression d’avoir une insolation, ou alors c’est le stress ?
Quand l’ombre arrive, je mets mes premiers essais, assez rapidement je passe le premier pas de bloc et me retrouve dans la partie finale, le creux du problème, une section de layback redoutable d’une dizaine de mouvements. Longueur est plutôt engagée sur des protections d’artif ce qui ajoute un peu de piment. A mon premier essai je chute en arrachant une protection, heureusement le birdbeak d’en dessous me retient. Essais 2, 3 et 4, je tombe à chaque fois tout en haut à deux doigts de l’enchaînement. Il fait bien noir désormais et j’ai 4 doigts en sang (et les autres ne sont guère mieux). Je me résigne, la 17 ce ne sera
pas pour ce soir. Je rentre au camp portaledge dépité. J’ai tout donné aujourd’hui mais ça n’a pas fonctionné. Ca va être très compliqué de sortir avant la pluie maintenant, d’autant que mon état physique et émotionnel est plutôt mauvais.
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Jour 13 : Longueurs 17 – 18 – 19 – 20. La météo empire et se confirme : il me reste 2 jours et une nuit de grimpe pour enchaîner les 5 dernières longueurs dures et les 11 longueurs finales un peu plus faciles. Je me sens complètement sous pression et acculé. Je n’y crois presque plus et ma peau est dans un piteux état. Je suis déjà en train d’élaborer des plans pour rester dans mon portaledge une semaine de plus pendant le mauvais temps tout en espérant que le haut sera encore grimpable après la pluie, ce dont je ne suis vraiment pas sûr. Mais j’ai l’intention de tout donner !
Aujourd’hui Erik Sloan prend le relais à l’assurage pour permettre à Soline de prendre une journée de repos bien méritée. Alex Eggermont a dû partir, mais Chris Nathalie est toujours bien présent pour filmer et prendre des photos.
La journée démarre en milieu d’après-midi dès que l’ombre arrive. Essai dans la 17 : Yess ! Ça passe directement et de manière assez fluide ! J’ai 6 doigts en sang maintenant, ça coule à travers le tape. Dès qu’Erik m’a rejoint, sans plus attendre, je pars dans la suivante L18 (un 5.13c/d – 8a+/b long et complexe, des blocs entrecoupés de repos). Je grimpe vite et bien et ça passe directement. Pareil dans la suivante (L19 – 513b – 8a) que j’enchaîne après un petit essai de calage. Il fait nuit à présent, mais je suis dans un bel état de motivation. Si je pouvais enchainer la suivante (la fameuse longueur 20, une magnifique longue dalle en 5.13c/d – 8a+/b) ce soir ça me mettrait dans une posture plutôt confortable pour sortir dans les temps. Je fais une montée de calage, puis un premier essai ou je tombe sur une perte d’équilibre dans le crux, le fameux mouv des pouces (il faut se rétablir à l’aide prises microscopiques inversées que tu ne peux prendre qu’avec les pouces, un mouv incroyable digne d’une coupe du monde de bloc). Je prends 10 minutes de repos et c’est parti : dans le crux je suis super concentré et combatif… Ça passe, et pareil dans le dernier pas de bloc. Ouf ! Ça se joue à pas grand chose, le tape manque de s’arracher et de me faire glisser de la prise. Bon je redescends au camp, à nouveau plein d’espoir ! Ce n’est pas gagné, mais c’est possible : il me reste une longueur vraiment dure (L21, 513d – 8b) et 11 longueurs plus faciles (entre 5.11+- 7a et 5.13a – 7c+).
Jour et nuit 14 : Longueur 21 ⇒ 32. Depuis quelques nuits je dors plutôt mal à cause du stress et de l’excitation et cette nuit ne fait pas exception. Aujourd’hui c’est le grand jour, on est le 30 janvier : je vais tenter le push final vers le sommet. Le lendemain matin en fin de matinée, la pluie est censée arrivée. Je démonte le camp et prépare un sac avec un portaledge et un fly pour éventuellement tenir quelque jours si on se retrouve coincé par la pluie. En début d’après-midi je fais une montée de calage dans la longueur 21. Dès que l’ombre arrive, je m’élance pour un essai. Je suis particulièrement stressé, mais je suis déterminé. Je grimpe bien et juste, je prends mon temps. Dans le crux là-haut, je serre les arquées plus que nécessaire: je sens mes tapes se déchirer sous mes doigts. Je me jette vers le coincement de doigt final et me rétablis sur la vire avec un cri de joie ! Ça y est, j’ai fait toutes les longueurs dures du Dawnwall. Je suis hyper heureux et fier.
Malheureusement je n’ai pas beaucoup le temps d’en profiter : il est 17h et j’ai 11 longueurs aventureuses et pas si faciles à faire avant le lendemain matin. La longueur 22, une longue fissure raide à doigts que je dois faire deux fois à cause d’une chute tout en haut. Cette longueur m’a profondément épuisé. J’avance lentement dans les longueurs qui suivent, j’essaye de récupérer. L’itinéraire n’est pas facile dans la nuit noire (on avait fait ces longueurs une fois seulement avec Siebe Vanhee 2 ans auparavant), et des sections sont plutôt engagées et impressionnantes. Des passages sans protections, des offwidth, des longues traversées sur des écailles qui sonnent creux, des prises qui cassent, des pitons instables, le haulbag qui se coince,… On a notre lot d’aventures. Je me sens plutôt mal, j’ai du mal à m’alimenter, j’ai envie de vomir et une grande fatigue dans le corps. A chaque longueur je dois me battre en laissant un peu de moi-même derrière moi. Soline est hyper soutenante et solide. Elle suit avec brio dans ces traversées effrayantes. A chaque relais elle m’encourage et me pousse à continuer, elle est un support exceptionnel. A 2h du matin,
on arrive à Ship Bow, la longueur 29. Il reste 4 longueurs mais je suis dans un état de fatigue avancé. On décide de faire une pause d’1h30 pour que je puisse récupérer un peu.
On essaye de manger un peu et de dormir, mais je ne parviens à faire ni l’un ni l’autre. A 4h, c’est reparti. Je chute en toute fin de la section en 5.11d – 7a offwidth de la longueur suivante à cause de mes techniques plutôt mauvaises en offwidth, je réessaye et repasse facilement en layback. Il reste 3 longueurs. Dans chacune d’entre elles je dois me battre, et à chaque relais j’ai l’impression que je vais m’évanouir, ou vomir. Le jour se lève dans l’avant dernière longueur, il fait nuageux mais il ne pleut pas encore. Chris Nathalie est au sommet pour nous attendre et documenter les derniers mètres. La longueur 31, un 5.13a-7c+ suivi d’un dièdre en 5.12a-7a rempli d’herbes me donne encore du fil à retordre. Je grimpe la dernière longueur (L32, 5.12b – 7b) rapidement, dans un état second. Je me rétablis au sommet à 8h. Victoire ! Nous venons de vivre une nuit intense et mémorable. La sensation est particulière… À cause de la fatigue, je ne réalise pas complètement que c’est terminé, que le Dawnwall est derrière moi. Il me faudra quelques heures voire plus pour pleinement comprendre et profiter. »
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Mais au-delà de la difficulté de l’escalade, de la logistique, des problèmes inévitables de peau, de fatigue et de météo, cette ascension s’inscrit dans un contexte plus global, à la fois en termes d’éthique personnelle et de message sociétal voulu par son auteur. Très investi dans une conduite aussi respectueuse du monde naturel que possible, Seb Berthe avait déjà refusé il y a deux ans de prendre l’avion pour se rendre en Amérique. Lui et ses compagnons d’aventure avaient affrété un voilier pour traverser l’océan atlantique, puis rallié le parc du Yosemite par la route — on se souvient de leur documentaire décalé Cap sur El Cap. Il nous avait d’ailleurs accordé une interview exclusive sur ce périple. Il en fut de même cette fois-ci, avec 50 jours de voilier (accompagnés entre autres par Aidan Roberts), puis trois semaines de bus afin de remonter l’Amérique centrale et le Mexique.
Le grimpeur belge est également désireux de profiter de cette ascension historique pour promouvoir une vision antifasciste mise à mal aux États-Unis, déjà quelques jours après l’investiture de Donald Trump et de ses sbires, mais aussi en Europe. Nous lui laissons la parole, à sa demande :
« Certes, il ne s’agit ici “que” d’une ascension d’escalade et de sport. Mais cette ascension est particulièrement importante pour moi, très certainement la plus importante de ma vie de grimpeur. Je sais aussi que cette ascension va sûrement avoir du retentissement dans le monde de l’escalade.
C’est pourquoi je souhaite utiliser mon ascension du Dawn wall pour mettre le sujet sur la table. Le silence est complice, la résistance est un devoir.
Je pense que ce qui se passe en ce moment en Belgique, en France, en Europe en général et aux USA est particulièrement grave et nous en subirons tous et toutes les conséquences, même dans le petit cocon privilégié de l’escalade. Le fascisme ne se résume pas à des discours haineux : il est aussi dans les violences policières, dans les discriminations racistes et systémiques, dans les attaques contre les droits des femmes et des minorités de genre. Être antifasciste, c’est refuser ces oppressions sous toutes leurs formes. Parlons-en, organisons-nous, allons manifester, opposons-nous…
Mes pensées et ma solidarité vont à toutes les personnes qui subissent et qui vont subir le plus les conséquences de cette montée du fascisme ! Courage ! »
Photos : Soline Kentzel, couverture Alex Eggermont
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On January 31, Belgian pro climber Seb Berthe (assisted by Soline Kentzel) achieved the feat of climbing the “Dawn Wall”! For the record, this is the hardest big wall in the world (9a max) created over some 8 years by Tommy Caldwell, and first climbed by him and Kevin Jorgeson in 2015. The “Dawn Wall” also made its mark at the time because it was the first free climbing route on the south-east face of El Cap, the aptly named “Wall of Early Morning Light”.
This is the fourth ascent of the route. We remember Adam Ondra’s lightning passage in 2016, crowned by a push in just 8 days. Tommy Caldwell needed 19, and Seb Berthe 14, with 5 days of rest, no return to the ground and no refuelling. And so the ambitious project begun two years ago has come to an end for the Belgian! Read about his push below!
‘Day 1: Pitches 1 to 6, and two attempts on pitch 7 (falling on the last move).Departure at 5 a.m. I feel quite stressed but also motivated and excited!
Climbing in the morning up to pitch 5 (I send the long and demanding pitch 3, a solid 5.13c/8a+, on my second attempt after an unfortunate slip just below the anchor on my first
go). A 2-3 hour break on the ledge at the base of pitch 6. I send pitch 6 immediately when the shade arrives.Reworking and ticking pitch 7, a slippery, technical, and unpredictable 5.14a/8b+.
I give it a try just before nightfall: I pass the crux and all the hard sections, but I forget to clip several pieces of protection, including the last bolt at the end of the difficulties. Now, I’m well above my last piece, a rusty birdbeak, and I feel exhausted. Falling here is not an option (it would mean a nearly 20-meter fall and possibly ripping out my gear). I’m completely at my limit. The risk is too high—especially with my back injury starting to hurt again—so, reluctantly, I grab the quickdraw. Phew, I’m safe, but that was a huge adrenaline rush. An intense way to end this first day. It’s dark, I’ll try again tomorrow.
Day 2: Pitches 7 – 8 – 9.
I wait for the shade to start climbing. At 2:30 p.m., I try pitch 7 again. I pass the crux quite easily, but my fingers and toes are getting tired in the final section, and I have to fight hard to reach the anchor! Yes, the first 5.14 is done 🙂 Only 6 more to go, haha! Next is a short, bouldery 5.13d/8b on bolts, a technical and finger-intensive challenge. First try, I slip. Second try, I pop off with my hand. Third try, my heel slips. Fourth try, I use the wrong beta… Oof, this is getting long and tough. Luckily, I finally figure out the best method for me and send it on my next go (5th or 6th try). By now, it’s dark, but I need to keep going to reach pitch 9. I put on my headlamp and launch into the slightly physical 5.13c/8a+ traverse. I reach the anchor quickly and smoothly.
Day 3: Rest at the portaledge camp. After two intense days, I decide to take a rest day, as the upcoming pitches are particularly hard and demanding. The goal is to take care of my skin, eat and hydrate well, and stay in the shade as much as possible (I use my sleeping bag as a sunshade above my portaledge).
Day 4: Pitches 10 – 11 – 12 – 13. This day is crucial for the rest of the ascent. I feel like I need to send these pitches quickly without using too much energy. After warming up and placing gear in pitch 10 (5.14a/b – 8b+/8c), I send it on my first try with a solid fight in the crux. I climb pitch 11 immediately afterward at dusk. After a 30-minute break, I also send pitch 12 (5.14b – 8c) on my first go. Pitch 13 (5.13b – 8a) also goes down on my first try after some minor reworking. The session went perfectly—now I’m at the base of THE crux pitch 14! I’m so fired up and full of adrenaline that I consider trying it that night.
Day 5: Rest before attempting the crux pitch tomorrow. I don’t feel particularly tired, but it’s important to be as fresh as possible for the upcoming crux pitch.
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Day 6: Pitch 14 (5.14d – 9a).
The conditions are warm for January, and I know temperature is a key factor for success on this triple-crux pitch. So, I decide to start climbing at 5 a.m., before sunrise and before the sun hits the wall. At 5:30, I take a first working burn to dial in the moves and refresh the chalk marks (without them, the holds might as well not exist…). I feel great. First redpoint attempt: I fly through the pitch, everything feels easy, and within minutes, I’m at the final crux—it’s happening! I go for the big move left, but just as I reach for the last holds… I slip.
A scream of frustration tears through me. I take 20 minutes to refocus and try again before the sun arrives. Second attempt—same thing: I feel amazing, I get to the final crux, then slip again. The sun is here, and it’s over for today… I feel so close, yet I have the sinking feeling that I might keep slipping over and over. Back at the portaledge, another issue arises—my back is in excruciating pain.
Days 7 and 8:
Rest. I had planned to climb the next day, but as soon as I wake up, I know it’s not happening. My back hurts too much. I start doubting whether I can finish this push. Slowly, with gentle stretching, the pain eases—though not completely.
Day 9: Pitch 14
When I wake up, my back feels better—not healed, but manageable with ibuprofen. It’s a cold, cloudy day—perfect conditions. I warm up by reworking the final crux to figure out why I kept slipping. I think I’ve found a solution—it’s all about foot positioning. First try: I slip at crux 2. Attempts 2, 3, and 4: I slip at crux 1. My back hurts. My toes are freezing in my tight shoes, and I struggle to keep them warm. Thankfully, Soline, the ultimate belayer, warms them up against her body between tries. Attempt 5: I pass crux 1 but fall at crux 2. Attempts 6, 7, 8, and 9: I slip again at crux 1. I start to despair.
It’s 4:30 p.m., and a snowstorm is coming at 5. One last try. I convince myself I can do it. Attempt 10. It’s not my smoothest go, but I stick crux 1, then crux 2. As I reach the final rest before crux 3… it starts snowing.My shoes and fingers are getting wet. It feels hopeless. But I have nothing to lose. I go for it. Somehow, I stick the big move. My foot stays in place. I reach for the final jug—I’m still on the wall… YES! I sent pitch 14, in the snow! Pure euphoria. Back at the portaledge, the snowstorm rages, but I’m ecstatic.
Day 10: Pitch 15
Despite yesterday’s long day, I’m getting ready to climb—I’m obviously super motivated. Because of the excitement, I didn’t sleep at all last night. My back still hurts, but yesterday’s session didn’t make it worse. The day is cloudy, conditions are perfect.
Pitch 15 is the second major challenge of the Dawn Wall after Pitch 14. This is where Kevin Jorgeson got stuck during the first ascent in 2015. The pitch is rated 5.14c/d – 8c+/9a. I would personally say more like 8c+, but a very technical and finger-intensive one. A long approach around 5.13d – 8b, followed by a precise boulder move requiring extreme foot and finger control.
First, I do a beta-checking go to mark holds with chalk. Then it’s go time. I feel very strong on my first attempt and quickly reach the final crux. I feel like I can do it, and then—“Shit!”— I slip, out of nowhere. Back to the previous belay, 20 minutes of rest.
Second attempt: I make a mistake and slip at the start. Damn. In my head, I start doubting, thinking I’ll keep slipping again and again like on Pitch 14. But I manage to pull myself together and focus on what I have to do, not on the result. On my next attempt—I send it! I squeeze my fingers harder than necessary in the crux, stay focused on the final moves, and it works! Yes!!! It’s starting to feel real now—I’m stoked! There’s still daylight left, and I think I have some energy left, so I go straight for Pitch 16, the Loop Pitch (an alternative to the famous dyno, rated 5.14a – 8b+). Probably the most unique
pitch on the Dawn Wall: it involves downclimbing for about 20 meters to a small ledge, an easy traverse left, and then a demanding endurance climb back up (slippery and technical
layback) I haven’t rehearsed these pitches as much as the previous ones. From the start, I knew I wasn’t fully prepared for them. I spend 45 minutes refining the beta. Then I give it a go but I fall on the downclimbing boulder problem, which I’m struggling to master. It feels super weird
to have to fight so hard while climbing down. Lack of strategy: I keep trying over and over without success, until two of my fingers start bleeding. My skin is completely wrecked.
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Day 11:
Rest I hadn’t planned on taking a rest day, but I have to face reality: the past two days have exhausted me, and my skin is in bad shape. The smartest move is to rest, even though I just want to push for the summit.
On the bright side, my back is stabilizing. The last two climbing days haven’t made it worse.
Day 12: Pitch 16
A tough day ahead. Bad news in the morning: the weather forecast shows only three days of good conditions before a week-long storm. I absolutely have to finish the route before the rain, otherwise, the upper pitches will likely be
wet and unclimbable. I feel extremely stressed. This isn’t the smooth push to the top I had hoped for. Plus, I’m unsure if I can send these last hard pitches quickly enough since I didn’t rehearse them well.
I start early. My goal: send Pitch 16 and 17 today (critical if I want to finish in three days before the rain). I feel strong, but I keep falling on the downclimb. Every time, a tiny mistake throws me off balance. The sun hits the wall, and I still haven’t made it past the way down.
I decide to give it one last try before waiting for shade, and phew, I make it through, but barely. I reach the small ledge at the bottom, a perfect resting spot where I can even take off my shoes. But I don’t stay long, the sun is now blazing, and I need to finish before it gets too hot. I climb well, pass the crux, but slip at the very last section.
At this point, I have to make a tough decision: if I want to finish the Dawn Wall before the rain, I must keep moving. So, I decide to bend my ethics a little. Instead of redoing the full descent, I start from the ledge effectively splitting the Loop Pitch into two pitches (probably turning it into two 5.13d routes instead of a 5.14a). I rest for 10 minutes, then go again. A few minutes later, I reach the belay. Loop Pitch is in the bag! I really don’t feel great about this style compromise, but it makes some sense: the ledge at the bottom of the Loop Pitch is probably the best rest spot in the last 10 pitches.
I take a few hours to rest before attacking Pitch 17—the last 5.14a of the route. That afternoon, I feel awful—nauseous, headache. Sunstroke? Stress? When the shade arrives, I try my first attempts. I quickly get past the first boulder problem and into the final section—a brutal layback sequence with about ten moves. This pitch is spicy, mostly on aid gears. On my first try, I rip out a piece, but thankfully, the birdbeak below holds me. Attempts 2, 3, and 4: I fall at the very end, just two moves from the send. By now, it’s completely dark, and I have four fingers bleeding (the others aren’t much better). I give up for tonight and return to the portaledge, feeling crushed. I gave everything, but it didn’t work. Now, finishing before the rain seems nearly impossible—and my physical and emotional state is a mess.
Day 13: Pitches 17 – 18 – 19 – 20
The weather forecast worsens: I have only two days and one night left to climb the remaining five hard pitches and eleven easier ones. I feel cornered, completely under pressure. I’m already making backup plans: if I can’t finish, maybe I’ll stay in my portaledge through the storm and hope the upper wall stays climbable. But that’s a huge gamble.
Today, Erik Sloan takes over belaying, so Soline can finally get a well-deserved rest. Chris Nathalie is still here filming and taking photos. I start climbing in the afternoon once the shade hits. And wow, what an afternoon! Pitch 17: Sent! Clean and smooth. Now I have six bleeding fingers.
Pitch 18 (5.13c/d – 8a+/b): Sent! I climb fast and efficiently. Pitch 19 (5.13b – 8a): Sent after a quick beta check. Now it’s nighttime, but I’m fully motivated. If I can send Pitch 20 (5.13c/d – 8a+/b) tonight, I’ll be in a strong position to finish on time. First attempt: I fall on a delicate balance move in the
crux—the thumb press move, a sequence of microscopic inverted holds where only your thumbs work. Second attempt: I fight hard and send it! I head back to camp, full of hope. It’s not done yet—but it’s possible: I have one really tough pitch left (Pitch 21, 5.13d – 8b) and 11
easier pitches (ranging from 5.11+ – 7a to 5.13a – 7c+).
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Day and Night 14: Pitch 21 → 32
For the past few nights, I haven’t been sleeping well due to stress and excitement, and this night is no exception. Today is the big day—it’s January 30th: I’m going for the final push to the summit. The next morning, rain is expected to arrive. I take down the camp and prepare a bag with a portaledge and a fly, just in case we get stuck by the rain for a few days. In the early afternoon, I do a warm-up on Pitch 21. As soon as the shade arrives, I go for an attempt. I’m incredibly stressed, but I’m determined. I climb well and precisely, taking my time. In the crux up high, I grip the crimps harder than necessary—I can feel my fingertips tearing under my fingers. I throw myself toward the final finger lock and mantle onto the ledge with a scream of joy! That’s it, I’ve completed all the hard pitches of the Dawn Wall. I feel incredibly happy and proud.
Unfortunately, there’s no time to celebrate: it’s 5 PM, and I still have 11 adventurous and not-so-easy pitches to climb before morning. Pitch 22 is a long, steep finger crack that I have to do twice due to a fall near the top. That pitch completely drains me. I move slowly through the next pitches, trying to recover. Navigating the route in the dark night isn’t easy (we had only climbed these pitches once before, two years ago, with Siebe Vanhee), and some sections are quite committing and intimidating. There are unprotected sections, offwidths, long traverses on hollow-sounding flakes, breaking holds, unstable pitons, and the haulbag getting stuck… We’re getting our fair share of adventure. I start feeling terrible: I struggle to eat, I feel like vomiting, and my body is deeply tired. With each pitch, I have to fight and leave a little piece of myself behind. Soline is incredibly supportive and solid. She follows brilliantly through these terrifying traverses. At every belay, she encourages me and pushes me to keep going. She’s an exceptional support.
At 2 AM, we reach Ship Bow, Pitch 29. Four pitches remain, but I’m utterly exhausted. We decide to take a 1.5-hour break so I can recover a little. We try to eat and sleep, but I can’t do either. At 4 AM, we set off again. I fall near the end of the 5.11d – 7a offwidth in the next pitch due to my poor offwidth technique. I retry and easily climb it in layback style. Three pitches to go. In each one, I have to fight, and at every belay, I feel like I might faint or throw up. Dawn breaks during the second-to-last pitch; it’s cloudy, but it hasn’t started raining yet. Chris Nathalie is waiting at the summit to document the final meters. Pitch 31, a 5.13a-7c+ followed by a 5.12a-7a dihedral full of grass, gives me another challenge. I climb the final pitch (Pitch 32, 5.12b – 7b) quickly, in a daze. I mantle onto the summit at 8 AM. Victory! We’ve just lived through an intense and unforgettable night. It’s a strange feeling… Due to exhaustion, I don’t fully grasp that it’s over, that the Dawn Wall is behind me. It will take me a few hours, or maybe more, to truly understand and appreciate it.‘
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But beyond the difficulty of the climb, the logistics, the inevitable problems of skin, fatigue and weather, this ascent is part of a more global context, both in terms of personal ethics and the societal message intended by its author. Seb Berthe, who is deeply committed to behaving as respectfully as possible towards the natural world, had already refused to take the plane to America two years ago. He and his fellow adventurers chartered a sailboat to cross the Atlantic Ocean, then drove to Yosemite Park-we remember their offbeat documentary Cap sur El Cap. He gave us an exclusive interview about that trip. It was the same this time, with 50 days on a sailboat (accompanied by Aidan Roberts, among others), followed by three weeks by bus up Central America and Mexico.
The Belgian climber is also keen to take advantage of this historic ascent to promote an anti-fascist vision that has been undermined in the United States, already a few days after the inauguration of Donald Trump and his henchmen, but also in Europe. We give him the final word, at his request:
« Sure, this is “just” a climbing ascent, a sporting achievement. But this climb is particularly important to me—probably the most significant of my life as a climber. I also know that it will likely have some impact in the climbing world. That’s why I want to use my Dawn Wall ascent to bring this issue to the forefront. Silence is complicity; resistance is a duty. What is happening right now in Belgium, France, Europe in general, and the United States is deeply concerning. We will all face the consequences, even within the privileged bubble of climbing. Fascism is not just about hateful rhetoric—it manifests in police violence, systemic racism and discrimination, and attacks on the rights of women and gender minorities. Being antifascist means rejecting all forms of oppression. Let’s talk about it, organize, protest, resist…
My thoughts and solidarity go to all those who are suffering and will suffer the most from this rise of fascism.«
Congrats Seb, and to the team!
Photos : Soline Kentzel – Cover Pic: Alex Eggermont