Quelques jours après “Rayu” flashé dès la première journée dans la voie, voici que Seb Berthe récidive en réalisant la classique dure des Picos, “Orbayu” (500m, 8c) au premier jour dans la voie ! Voici son retour.
“La semaine dernière, j’ai enchainé “Orbayu” à la journée au Picu Uriellu, Picos de Europa dès mon premier jour dedans.
Cette voie de 500m en 8c est située sur la face Ouest du Picu Urriellu, plus connu sous le nom de Naranjo De Bulnes dans le Parc National des Picos d’Europa, en Espagne. Cette ligne de 14 longueurs est en partie une version libre de “Mediterraneo”, une voie d’artif datant de 1980, et a été libérée pour la première fois en 2009 par Iker Pou et son frère Eneko. Les précédentes répétitions ont été réalisées par Nicolas Favresse et Adam Pustelnik en 2011, Cédric Lachat en 2014, Edu Marin en 2016, Gorka Karapeto en 2017, et Siebe Vanhee en 2020.
Le vendredi 25 août, avec les grimpeurs français Soline Kentzel, Ugo Monier et Erwan Rucay (les deux derniers sont venus prendre des photos et grimper un peu dans les premières longueurs), nous avons commencé la première longueur en 7c à 7h15. J’ai grimpé vite et fort dans les 4 premières longueurs (cotées 7c, 8a+, 8a et 7a, mais probablement plus faciles que ça) en les flashant ou en les faisant à vue. Je suis arrivé devant la longueur crux vers 10h, me sentant frais, confiant et prêt à en découdre !
Seule mauvaise nouvelle : le temps changeait beaucoup et les nuages se rapprochaient dangereusement. Le nom de la route, “Orbayu”, vient des nuages bas très typiques venant de l’océan qui vous mangent littéralement : brouillard humide et peu de visibilité. Le moins que l’on puisse dire, c’est que nous avons eu notre dose d'”Orbayu” ce jour-là ! Dès que j’ai commencé à grimper dans la longueur en 8c, les nuages d’Orbayu sont venus sur nous.
Mon premier essai flash s’est arrêté assez rapidement : je suis tombé au crux à cause d’une mauvaise méthode. Ensuite, j’ai passé presque une heure à trouver mon chemin jusqu’au relais et à régler les détails. Après le crux, la dernière partie de la longueur n’a plus de boulons et est assez délicate : escalade assez physique, trous glissants (aspérités où les grimpeurs d’artifs mettraient des coinceurs), difficile à protéger,… De retour au relais, je me sentais confiant et optimiste quant à mes chances de réussite ce jour-là.
Malheureusement, ma deuxième tentative ne s’est pas vraiment déroulée comme prévu : les nuages nous trempaient… Le rocher était encore sec, mais les cordes, dégaines, la peau étaient mouillées. La résistance de la corde était terrible à cause de l’eau sur la corde, j’ai glissé une fois, j’ai glissé deux fois, mais j’ai réussi à rester sur le mur. Mais après une bataille sur le crux, cette tentative s’est mal terminée : je suis tombé dans le dernier mouvement de la section avec un bout de doigt fendu, une plaie sanglante sur l’index.
L’orbayu entrait et sortait et il était impossible de prévoir un moment pour grimper. Après un très long repos, j’ai mis du strap sur mon doigt et j’ai fait le troisième essai. Il s’est terminé de la même manière que le deuxième. Les choses allaient mal et mes chances de réussir diminuaient drastiquement…
Je me sentais fatigué et pessimiste. Mais Soline, Ugo et Erwan étaient tellement heureux ! L’ambiance était géniale et je ne peux que vous recommander d’apporter un tel enthousiasme dans votre propre projet en grande-voie ! J’ai décidé de tenter ma chance une dernière fois…
J’ai décidé de tenter ma chance une dernière fois, juste pour le jeu. L’escalade était dure, j’étais lent et faible, la peau me faisait mal. L’équipe m’encourageait tellement. La bataille était lancée ! D’une manière ou d’une autre, grâce à ces gars, j’ai grimpé jusqu’au crux. Je devais maintenant rester calme et me concentrer. J’ai pris mon temps et je me suis battu avec acharnement dans la dernière section, me sentant fatigué et gonflé à bloc. Quel moment d’enfin clipper le relais après environ 30 minutes de lutte ! Je n’arrivais pas à croire ce que je venais de faire !
Il était 17h (on a passé 6-7 heures sur cette longueur) et il fallait faire vite : il y avait encore 10 longueurs délicates sur protections… J’ai réalisé à vue le 8a suivant et Soline et moi avons continué à avancer lentement (l’escalade était assez facile mais les protections et la lecture étaient techniques) jusqu’au sommet du Picu Uriellu ! “Cumbre” au dessus des nuages, il était 23h.
Nous avons finalement atteint le parking à 3h du matin, en nous perdant plusieurs fois dans les nuages très humides lors de la descente… Ugo et Erwan nous attendaient toujours avec de la nourriture, reconnaissants ! Une belle journée de 21 heures !
Merci à Soline, Erwan, Ugo, Siebe, Nolwen, Kico et Alvaro !
Note : Difficile pour moi de donner un avis honnête sur le niveau du crux. Les conditions n’étaient probablement pas optimales et j’ai lutté assez longuement… Les grimpeurs précédents l’ont évaluée à 8c. Comparé aux autres voies sportives que j’ai faites dans le coin, il m’a semblé similaire aux 8c que j’ai essayés. Pourtant, je ne serais pas surpris si c’était 8b+. Elle est probablement plus dure que la longueur crux de “Rayu”.
Quoi qu’il en soit, encore une belle escalade !”
Photos : Erwan Rucay
A few days after “Rayu”, flashed on the first day trying the route, Seb Berthe did it again by repeating the Picos’ hard classic, “Orbayu” (500m, 8c) again at his first day on it! Here’s the story.
Last week I sent Orbayu in a day on Picu Urielu, Picos de Europa on my first ever day climbing on it.
This 500m 8c multi-pitch is located on the West Face of Picu Urriellu, more commonly known as Naranjo De Bulnes in the Picos de Europa National Park, Spain. The 14-pitch line is in part a free version of Mediterraneo, an aid route established in 1980, and was first climbed free in 2009 by Iker Pou and his brother Eneko. Previous repeats were carried out by Nicolas Favresse and Adam Pustelnik in 2011, Cédric Lachat in 2014, Edu Marin in 2016, Gorka Karapeto in 2017, and Siebe Vanhee in 2020.
On Friday 25th of august, together with french climbers Soline Kentzel, Ugo Monier, Erwan Rucay (last two came to take pictures and climb a bit in the first pitches), we started on the first 7c pitch at 7:15am. I climbed fast and strong through the first 4 pitches (graded 7c, 8a+, 8a and 7a, but are most probably easier than that) flashing or onsighting all of them. I arrived at the base of the crux pitch around 10am, feeling fresh, confident and ready to try hard!
The only bad new: the weather was changing a lot, and clouds were dangerously coming closer and closer. The name of the route, “orbayu”, comes from the very typical low clouds coming from the ocean that are literally eating you: wet fog and not much visibility. The least we can say is that we had our dose of Orbayu that day! As soon as I started climbing on the 8c pitch, Orbayu clouds were on us.
My first flash go stopped quite fast: I fell at the crux due to a wrong beta. Then, I spent almost an hour finding my way up to the anchor and dialing the beta. After the crux, the final bit of the pitch has no bolts anymore and is quite tricky: quite physical climbing, slippery pockets (pinscars where aidclimbers would put pegs), hard to protect,… Back down to the belay, I felt confident and optimistic about my chance of success that day.
Unfortunately, my second attempt didn’t really go as expected: the clouds were soaking us… Rock was still dry, but ropes, draws, skin were wet. Rope drag was terrible due to water on the rope, I slipped once, I slipped twice, but stayed somehow on the wall. But after a battle on the crux, this try ended badly: I fell at the last move of the section with a split fingertip, a bloody wound on my index finger.
The orbayu was coming in and out and it was impossible to predict when it would be time to climb. After a really long rest, I put some tape on my finger and I went for the third try. It ended the same way as the 2nd. Things were going bad and my chances of doing it were decreasing drastically…
I felt tired and pessimistic. But Soline, Ugo and Erwan were so happy and psyched! The mood was great and I can only recommend you to bring in your own multipitch project 🙂
I decided to give it a last go, just for the game. The climbing was hard, I was slow and weak. skin hurt. The crew was cheering so much. Battle was on! Somehow, thanks to those guys, I climbed my way through the crux. I now needed to stay really calm and focus. I took my time and fought so hard in the final section, feeling tired and pumped. What a moment to finally clip the anchor after about 30min of fight! Wow, I couldn’t really believe what I had just done…
It was 5pm (spent about 6-7 hours on that pitch) and we had to be fast: there were 10 more tricky pitches on gears… I onsighted the following 8a and Soline and I kept moving slowly (quite easy climbing but interesting protection and itinerary) to the top of Picu Urielu! “Cumbre” above the clouds, it was 11pm.
We finally reached the parking lot at 3am, getting lost a few times in the very wet clouds on the way down… Ugo and Erwan were still waiting for us with food, grateful! A nice 21hours-day!
Thanks to Soline, Erwan, Ugo, Siebe, Nolwen, Kico and Alvaro!
Note: Hard for me to give an honest opinion about the grade of the crux pitch. Conditions were probably not optimal and I struggled quite hard… Previous climbers gave it around 8c. Compared to the other sport climbs I’ve done around here, it felt similar to the 8c’s I’ve tried. Still I would not be surprised if it was 8b+. It is probably harder than the crux pitch of Rayu.
Anyway, another great climb out there!
Pics: Erwan Rucay
Troisième ascension de Bon Voyage par Seb Berthe !
[…] du 9b en cours, comme d’aller se frotter aux bigs walls les plus durs du Monde comme “Orbayu” ou le Dawn Wall ou réaliser de beaux faits d’armes en trad. Un grimpeur polyvalent […]