A un mois près, il aurait presque pu se retrouver inclus dans la news précédente ! Le grimpeur Suisse Théo Chappex, presque 40 ans, est un des bloqueurs les plus actifs de sa vallée depuis longtemps, avec de nombreuses premières ascensions et répétitions difficiles qui passent complètement sous les radars. Théo vient de réaliser la première ascension de “Ten Criminals” 8C à Pralong, une ligne qu’il convoitait depuis 4 ans ! C’est sa seconde ouverture dans le niveau après “Meithra”. Nous avons tenté de lui tirer les vers du nez !
– Peux tu te présenter rapidement ?
Théo Chappex, 40 ans dans un mois.
– Tu sembles accorder de l’importance à l’ouverture en bloc ? Qu’est ce qui te plait dans le processus de réaliser une première ascension ?
J’ai l’impression que ça s’est développé naturellement, notamment à cause de la région dans laquelle j’habite où il n’y a pas de grand secteurs de bloc. Et dans la majeure partie des cas, les blocs sont isolés. Il y a donc toujours eu beaucoup à ouvrir et relativement peu de volume concentré comme on peut le connaître au Tessin par exemple.
Peut-être aussi parce que j’ai commencé le bloc à une époque où il y avait encore un gros potentiel d’ouverture dans la région, on avait vraiment cette culture de l’ouverture étant donné que très peu de choses étaient développées.
Le fait que ce soit une première ascension m’importe peu dans l’absolu, j’aime surtout éviter les foules et être perdu en montagne seul ou en petit comité.
– Comment fais-tu pour trouver des lignes ? Ballades ? bouche à oreille ? Google Earth ? En plus de la ligne, le cadre a l’air important pour toi.
Je vais en montagne depuis tout jeune, d’abord avec mon père puis avec des potes. Donc j’ai découvert ces blocs principalement via l’alpinisme, la rando à ski ou parfois même lors d’approche pour aller faire de la cascade de glace. Avec le temps je commence à connaître un peu tous les recoins isolés de la région et il me reste une liste énorme de projets à ouvrir… il faudrait plus de temps ou être plus fort pour tout faire !
– Après “Meithra” en 2018, tu ouvres une 2e proposition en 8C avec “Ten Criminals”. Décris-nous le passage.
C’est une ligne qui part assis à gauche de “Manhattan Reine Cantonale” (un 8B+ mythique que j’avais ouvert en 2016). La ligne fait 16 mouvements et se termine dans la dernière section de “Manhattan R.C.” Globalement je pense qu’on peut séparer la ligne en deux sections de 8A+/B et 8B sans transition. J’ai trouvé que la ligne était très exigeante, longue, avec une difficulté des mouvements globalement croissante. Ça a été un gros challenge personnel.
La ligne n’est pas aussi pure et directe visuellement que “Manhattan R.C”., mais l’escalade dans la première section y est bien plus classe. Avec une première section traversante ayant une gestuelle assez atypique… un chef d’œuvre !
– Comment s’est passé le processus de travail de ce bloc ?
C’est 4 ans de séances durant les mois les plus froids. J’estime qu’il m’a fallu environ 40 séances sur cette période. En creusant peut être qu’il y en a eu 50…? Je pense avoir touché là mes limites en termes de nombre de séances (j’espère en tout cas !). Malheureusement j’ai vraiment manqué de régularité et je finissais toujours la saison sur un échec. Du coup ça a traîné en longueur et le combat est devenu plus psychologique que physique.
L’hiver passé j’ai fait une session avec un pote qui travaillait “Manhattan R.C.” Lors d’un essai il a cassé la moitié de la dernière réglette du crux final ! Heureusement j’ai rapidement pu refaire ce mouvement, mais ça a rendu la ligne encore plus dure. Physiquement et mentalement…
Par moments j’en avais marre de ces mouvements que je connaissais par cœur, mais j’avais investi trop de temps pour abandonner… Puis finalement la motivation est revenue, avec une meilleure forme physique, et ça l’a fait ! Je soupçonne que l’installation d’une Moonboard à la maison y soit pour quelque chose… Lors de la première séance cette saison j’ai senti que j’étais plus puissant dans les crux et ça m’a mis en confiance.
– Tu vis dans le Valais. Parle-nous du potentiel ici. Les spots déjà existants et ce qu’il reste à développer.
Le Valais, c’est beaucoup de petits secteurs, voire même souvent des lignes isolées un peu éloignées. Le potentiel de développement consiste principalement en des lignes isolées ou des petits secteurs de moyenne/haute-montagne.
Le risque c’est que ces blocs isolés, après l’ouverture, retombent dans l’oubli. C’est déjà le cas pour certaines lignes que j’ai ouvertes… mais en fait ce n’est pas très grave. Je trouve qu’on n’est pas toujours obligé de laisser une trace indélébile. J’aime l’idée que certaines lignes perdent toute trace de grimpe et que d’autres grimpeurs puissent redécouvrir l’endroit.
Après, évidemment que quand je mets autant d’énergie pour ouvrir une ligne comme “Ten Criminals”, j’ai envie de le dire ! On est tous pareil !
– Quels sont tes projets les plus fous en bloc ?
La liste est longue… les plus fous ne sont probablement pas les plus durs mais les plus éloignés, les plus alpins !
Photos : coll. Marie Dorsaz
Within a month, we could included him in the previous news! Swiss climber Théo Chappex, almost 40, has been one of most active climbers for a long time in Valais, with many tough first ascents and repeats in his valley, completely under the radar. Théo just completed the first ascent of a new testpiece, “Ten Criminals” 8C in Pralong, a line he has been projecting since 2018 ! This is his second first ascent in the 8C range after “Meithra”. More infos about this new addition with him.
– Can you introduce yourself shortly?
Théo Chappex, in a month I will turn 40.
– You seem to give importance to first ascent in bouldering?
I have the impression that it was quite natural for me, in particular because of the region where I live where there’s no huge bouldering area. And in most of cases, the boulders are isolated. There is a lot of boulder to open and relatively little concentrated area like in Ticino for example.
Maybe also because I started bouldering at a time when there was still great potential for new developments in the region, we really had this first ascent culture because few aeras were explored.
The fact that it’s a first ascent doesn’t matter to me in absolute terms, I especially like to avoid crowds and be lost in the mountains alone or with a small group of friends.
– How do you find new lines?
I have been going to the mountains since I was very young, first with my father then with friends. So I discovered these boulders mainly through mountaineering, ski touring or sometimes even when approaching to go ice climbing. Over time, I begin to know a little about all the isolated areas of the region and I still have a huge list of projects to open… It would take more time or be stronger to do everything!
– After “Meithra” in 2018, you just open a second proposition in 8C with “Ten Criminals”. Describe the passage.
It’s a line that starts sitting to the left of “Manhattan Reine Cantonale” (a mythical 8B+ that I opened in 2016). The line is 16 moves long and ends in the final section of “Manhattan R.C.”. I think we can split the line into two sections of 8A+/B and 8B without transition. The problem is very demanding, long, with generally increasing difficulty. It was a big personal challenge.
The line is not as pure and direct visually as “Manhattan R.C”., but the climbing in the first section is much more cool. With a first traverse section with uncommon moves… a masterpiece!
– How was the process for “Ten Criminals”?
It’s a 4 years process with sessions during the coldest months. I estimate that it took me around 40 sessions over this period. Maybe more, 50? I think I have reached my limits here in terms of number of sessions (I hope anyway!). Unfortunately I really lacked consistency and I always ended the seasons with a failure. So it was long and the fight became more psychological than physical.
Last winter I did a session with a friend who worked “Manhattan R.C.” During a go he broke half of the last crimp in the final crux! Fortunately I was able to quickly stick again this move, but it made the line even harder. Physically and mentally…
Sometimes I was fed up with these movements that I knew by heart, but I had invested too much time to give up… Then finally the motivation returned, with better physical shape, and it finally worked! I suspect that the arrival of a Moonboard at home has something to do with it… During the first session this season I felt that I was more powerful in the cruxs and that gave me confidence.
– You live in Valais, Switzerland. Tell us about the potential here.
Valais is full of many small sectors, often even isolated lines a little far away. The development potential consists mainly of isolated lines or small medium/high mountain sectors.
The risk is that these isolated boulders, after opening, fall back into oblivion. This is already the case for some lines that I have opened… but in fact it’s not very serious. I find that we are not always obliged to leave an indelible mark. I like the idea that some lines lose all trace of climbing and that other climbers can rediscover the place.
Afterwards, obviously when I put so much energy into opening a line like “Ten Criminals”, I want to promote it! We are all the same!
– Which craziest bouldering project will be next?
The list is long… the craziest are probably not the hardest but the most distant, the most alpine!
Photos : coll. Marie Dorsaz
Théo Chappex meldet Erstbegehung von "Ten Criminals" (8C) - Der Kletterblock
[…] Fanatic Climbing in einem Interview mit Théo Chappex berichtet, dass Selbiger den Boulder „Ten […]